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Suspension des réductions fiscales pour les dons aux associations commettant des infractions

Publié le 03.01.2023

Associations : La justice fiscale tord le bras à la justice civile et pénale ! Suite des attaques contre le secteur associatif depuis septembre.

 

On vous parlait fin septembre de la pétition de la toute puissante Fédération nationale des chasseurs, intitulée “Pour la fin de la réduction fiscale pour les dons aux associations qui utilisent des moyens illégaux contre des activités légales” qui avait conduit le Sénat à diligenter une mission d’information « flash » sur le sujet confiée à Jean-François Husson et à Eric Jeansannetas. (cf. notre articlesur le sujet)

Le mois suivant, nous assistions éberlués à deux heures de débat nocturne à l’Assemblée nationale en première lecture du Projet de Loi de Finances sur une série d’amendements portée par les députés Républicains proposant le retrait de la capacité des associations à émettre des reçus fiscaux pour les associations dont les adhérents seraient reconnus coupables d’actes d’intrusion sur les propriétés agricoles et les établissements industriels (…).

Amendements rejetés par 139 voix contre 97 au terme d’un ping-pong hallucinant entre accusations et dénonciations des « terroristes » associatifs, postures théâtrales de défense du monde paysan et à l’autre bout du spectre, plaidoyer pour la désobéissance civile et la protection des « lanceurs d’alertes ».

Amendements qu’on retrouvera au Sénat, puis en 2ème lecture et qui heureusement ne sont pas le texte final validé par l’utilisation du 10ème 49/3 de la Première Ministre, Elisabeth Borne le 15 décembre.

On rappellera, puisqu’il le faut, ce que les juristes appellent la « summa divisio » ou la séparation entre droit public et droit privé. Dès lors, le juge fiscal ne peut se substituer au juge civil ou pénal. Bien plus, les associations et leurs dirigeants ne doivent pas être condamnés pour des actes commis par leurs adhérents.

Et c’est là où le bât blesse…

Car entre temps, le Sénat a publié le 12 décembre son rapport d’information. Il constate ce que nous n’avions pas manqué de leur rappeler (cf. notre article sur les contrôles auxquels sont soumises les associations) que l’administration fiscale dispose déjà d’outils pour suspendre le régime fiscal des dons pour les associations ayant commis des infractions très précises.

Ce qu’il ne dit pas dans ses conclusions mais qu’on retrouve dans le corps du texte du rapport, c’est que la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République semble avoir donné à l’administration fiscale, selon sa propre interprétation, des pouvoirs de sanction étendus, bien au-delà des cas prévus par la loi de 2018 (escroquerie, abus de confiance, blanchiment, recel, actes de terroristes…)

Ainsi, le rapport souligne qu’une « ambiguïté subsistait sur la portée du contrôle opéré dans le cadre de l’article 18 de la loi du 24 août 2021 » : contrôle de conformité de l’objet d’intérêt général au régime du mécénat ou contrôle approfondi des moyens utilisés par l’association pour remplir sa mission ? L’administration fiscale répond sans ambiguïté et déclare disposer « d’une marge d’appréciation quant à savoir quels actes illégaux seraient passibles d’une suspension de l’avantage fiscal pour les dons ».

Autrement dit, pas besoin d’amendements et de débat à l’Assemblée ou au Sénat, l’administration fiscale pourrait déjà faire « le job ».

On rappellera que la Loi du 24 août 2021 avait pour objectif de doter le gouvernement des moyens de lutter contre le terrorisme et son financement. Le secteur s’était ému à raison (cf. notre article à l’époque sur le sujet) de ce que l’arsenal déployé pouvait intégrer comme dérives et entraves à la liberté associative…

Nous y sommes.

 

Laurence

Laurence LEPETIT,
Déléguée générale de France générosités.

 


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