Dématérialisation des procédures des organismes philanthropiques : où en est-on ?
Publié le 17.07.2025
Chantier lancé en 2022 par le ministère de l’Intérieur, la dématérialisation des procédures relatives aux associations et fondations est bien en marche. Une nouvelle plateforme dénommée « Service d’information des associations et fondations » a ainsi été mise en ligne et devrait permettre de réaliser une trentaine de procédures de manière dématérialisée. Précisions sur les contours de cette nouvelle plateforme. Le présent article est mis à jour au regard des précisions apportées par le ministère de l'Intérieur. < Publié le 8 janvier 2025, mis à jour le 17 juillet 2025. >
Dans un contexte de contrôle accru des organismes à but non lucratif notamment avec la loi confortant le respect des principes de la République et partant du constat du défaut d’information partagée des différents services de l’administration, le ministère de l’Intérieur a lancé en 2022 un chantier en vue de dématérialiser et simplifier un certain nombre de procédures. Ce chantier s’est formalisé par la publication du décret n°2024-720 du 5 juillet 2024 qui vise à dématérialiser et simplifier les procédures applicables aux organismes philanthropiques, notamment concernant la reconnaissance d’utilité publique[1] et par la mise en service progressive d’une nouvelle plateforme dénommée « service d’information des associations et fondations » (SIAF). Cette plateforme devrait aussi permettre d’accélérer les délais l’instruction des dossiers (environ 400 en cours d’examen fin 2024) qui pouvait aller jusqu’à 2 ans.
1. Champ d’application de la nouvelle plateforme
Cette plateforme doit permettre de réaliser les procédures suivantes qui concernent les associations reconnues d’utilité publique (ARUP), les fondations reconnues d’utilité publique (FRUP), les fonds de dotation, les fondations d’entreprise ainsi que les associations simplement déclarées et associations cultuelles pour certaines procédures spécifiques.
6 procédures pour les fondations d’entreprise :
- Autorisation de création (préfecture)
- Autorisation de modification statutaire (préfecture)
- Prorogation et majoration par avenant (préfecture)
- Déclaration annuelle des comptes et rapport d’activité (préfecture)
- Déclaration des changements dans l’administration (préfecture)
- Déclaration de dissolution (préfecture)
6 procédures pour les fonds de dotation :
- Déclaration de création (préfecture)
- Déclaration de modification statutaire (préfecture)
- Déclaration annuelle des comptes et rapport d’activité (préfecture)
- Autorisation pour procéder à l’appel à la générosité (préfecture)
- Déclaration des changements dans l’administration (préfecture)
- Déclaration de dissolution (préfecture)
2 procédures relatives aux libéralités et aux appels à la générosité du public :
- Déclaration des libéralités aux Etats et établissements étrangers (Direction des libertés publiques et des affaires juridiques – DLPAJ)
- Déclaration d’appel à la générosité du public (préfecture)
2 procédures pour les associations loi 1901 :
- Délivrance d’une décision de non opposition aux legs ou donations (préfecture)
- Délivrance d’un rescrit administratif de reconnaissance de la capacité juridique à recevoir des legs et donations (préfecture)
13 procédures pour les associations et fondations reconnues d’utilité publique :
- Aide à la création des statuts ARUP/FRUP (DLPAJ)
- Aide à la modification des statuts ARUP/FRUP (DLPAJ)
- Dépôt de demande reconnaissance d’utilité publique (DLPAJ)
- Dépôt de demande de modification statutaires ARUP/FRUP (DLPAJ)
- Déclaration de règlement intérieur ARUP/FRUP (DLPAJ)
- Déclaration de changes des partenaires institutionnels FRUP (DLPAJ)
- Déclaration de transfert de siège social ARUP/FRUP (DLPAJ)
- Demande de dissolution ou de retrait de reconnaissance d’utilité publique ARUP/FRUP (DLPAJ)
- Déclaration des changements dans l’administration ARUP/FRUP (préfecture)
- Autorisation des emprunts (préfecture)
- Autorisation des aliénations et apports (préfecture)
- Transmission annuelle des comptes rapports d’activité ARUP/FRUP (préfecture)
- Transmission des PV des FRUP (préfecture)
2 procédures relatives aux associations cultuelles :
- Déclaration de la qualité d’association cultuelle (préfecture)
- Déclaration des financements étrangers (DLPAJ).
Les associations simplement déclarées ne sont donc que ponctuellement concernées et le registre national des associations (RNA) va subsister dans l’attente d’une fusion avec ce nouvel outil (date inconnue).
Ne sont pas non plus visées les fondations à objet spécifique (de coopération scientifique, hospitalières, universitaires, partenariales) ni les fonds de pérennité.
2. Une nouvelle méthode de travail
Nous attirons votre attention sur le changement de méthode opéré par l’administration. Dans le cadre d’une phase de préinstruction (service d’accompagnement à l’élaboration des projets), les porteurs de projet sont invités à répondre à un certain nombre de questions (« formulaire d’aide à la rédaction ») qui permettront au Bureau des associations et fondations (BAF) du ministère de l’Intérieur de rédiger un projet de statuts. Ce projet de statuts rédigé par l’administration n’est pas impératif et pourra être discuté par les porteurs de projet mais il est fortement incitatif : le ministère de l’Intérieur précise en effet que “le délai d’instruction ultérieur du dossier sera d’autant plus réduit que l’ensemble de questions, remarques et demandes auront été réglées par anticipation“. Cette demande d’aide est “facultative mais fortement recommandée“.
En tout état de cause, la pratique habituelle visant à motiver chaque écart par rapport aux statuts-types est maintenue.
Après cette phase de préinstruction, une phase d’instruction est ouverte. Tout dossier incomplet sera automatiquement rejeté.
En ce qui concerne les modifications statutaires, une phase de préinstruction est également mise en place. Il conviendra sur la plateforme d’expliquer les motifs de cette modification statutaire. Si les statuts ne correspondent pas aux statuts-types actuels, ils devront être modifiés intégralement (ce qui était déjà la pratique jusqu’alors).
En ce qui concerne le règlement intérieur des associations et fondations reconnues d’utilité publique, dont le contenu est désormais fixé par l’arrêté du 8 novembre 2024, les organismes concernés n’ont pas l’obligation dès à présent de mettre à jour leur règlement intérieur. Cette mise à jour s’effectuera, si besoin, à l’occasion d’une déclaration de modification.
A titre transitoire, les dossiers déjà déposés et en cours d’examen n’ont pas l’obligation d’être redéposés en ligne, la procédure suivant son cours. En revanche, tout nouveau dossier déposé par courrier électronique ou par voie postale est désormais irrecevable par les services instructeurs (préfecture ou ministère).
3. Architecture du projet
Le choix a été fait de passer par le site https://www.demarches-simplifiees.fr/ que les organismes faisant appel à la générosité connaissent car il permet de déclarer les dons reçus et le nombre de reçus fiscaux émis[2].
Pour les fondations :
- la procédure d’aide à la l’élaboration des statuts c’est ici .
- le dépôt d’une demande de création d’une fondation c’est ici.
- la procédure d’aide à la modification des statuts c’est ici.
- la procédure de demande de modification statutaire c’est ici.
- la déclaration du règlement intérieur c’est ici.
- la déclaration de changement de siège social ou de changement de partenaires institutionnels d’une fondation c’est ici.
- la déclaration de changement de partenaires institutionnels c’est ici.
- la déclaration de changement dans l’administration c’est ici
- la transmission des procès-verbaux c’est ici
- la transmission des comptes et rapport d’activité annuels c’est ici
- la demande d’autorisation des actes de disposition (aliénations et emprunts) c’est ici.
Pour les associations reconnues d’utilité publique : le déclaration de tout nouveau règlement intérieur s’effectue ici.
Le dossier est automatiquement envoyé au service compétent et une messagerie intégrée devrait faciliter les échanges entre l’administration et le porteur de projet. La plateforme permet de suivre également l’état d’avancement du dossier.
Autour de ce site, une « bibliothèque numérique » absorbera toutes les données déposées et servira d’espace de stockage et un « registre national des fondations (RNF) » est créé afin de recenser toutes les données légales. Ce registre n’est pas accessible au public. En effet, chaque structure dispose d’un numéro d’identifiant propre qui permettra aux administrations de collecter facilement des informations utiles sans le demander à l’organisation elle-même (application du principe « dites-le nous une fois »).
Avant d’engager toute démarche en ligne, la fondation devra déposer une demande d’identifiant RNF ici.
4. Calendrier
Pour les fondations, la plateforme est opérationnelle depuis le 18 décembre 2024 (pour les procédures relevant du ministère de l’Intérieur) et depuis le 18 juin 2025 (pour les procédures relevant des préfectures). Par conséquent, les procès-verbaux des conseils d’administration devant être transmis sont ceux des réunions qui se sont tenues après le 18 juin 2025 (pas d’effet rétroactif).
Pour les associations reconnues d’utilité publique, seule la démarche concernant la déclaration du règlement intérieur est opérationnelle. Les autres démarches (reconnaissance d’utilité publique, modification statutaire, changement de siège etc.) devraient pouvoir être réalisées à l’automne 2025.
5. Focus sur les bénéficiaires effectifs
Selon l’article L. 561-4-1 du Code monétaire et financier, les entreprises visées à l’article L. 561-2 du Code monétaire et financier doivent appliquer des mesures de vigilance dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. En particulier, elles doivent identifier le « bénéficiaire effectif » de leur client.
Le bénéficiaire effectif est, selon l’article L. 561-2-2 du Code monétaire et financier, la ou les personnes physiques
- Soit qui contrôlent directement ou indirectement le client
- Soit pour laquelle une opération est exécutée ou une activité est exercée.
Jusqu’en avril 2024, les associations, fondations et fonds de dotation devaient obtenir et conserver les informations sur leurs bénéficiaires effectifs (article L. 561-45-1 du code monétaire et financier) sans obligation de les déclarer dans un registre centralisé (article L. 561-46 du code monétaire et financier).
Depuis la loi n°2024-364 du 22 avril 2024, les associations, fondations et fonds de dotation doivent désormais déclarer ces bénéficiaires effectifs dans un registre dédié (nouvel article L. 561-46-1 du code monétaire et financier).
En outre, la définition des bénéficiaires effectifs des associations, fondations et fonds de dotation a été modifiée par le décret du 5 juillet 2024 précité.
L’ancien article R. 561-3 du Code monétaire et financier visait le ou les représentants légaux de l’association, le président, le directeur général ainsi que, le cas échéant, le ou les membres du directoire de la fondation et le président du fonds de dotation. Est désormais visée « toute personne exerçant en son sein des fonctions d’administrateur, des fonctions de surveillance ou des fonctions de direction est regardée comme bénéficiaire effectif ».
Selon le ministère de l’Intérieur cette définition élargie des bénéficiaires effectifs inclut :
- toute personne désignée par les statuts ou par l’organe décisionnel de l’organisme qui dispose des plus larges pouvoirs d’administration (représentation de l’organisme dans tous les actes de la vie civile et devant la justice, engagement et paiement des dépenses, encaissement des recettes…) ; et
- toute personne salariée disposant des plus larges pouvoirs de direction au sein de l’organisme ; et
- toute personne désignée par les statuts ou par l’organe décisionnel de l’organisme disposition des plus larges pouvoirs de surveillance.
En pratique, sont donc visés :
- pour les FRUP disposant d’un conseil d’administration : au moins tous les membres du bureau et le directeur général ;
- pour les FRUP disposant d’un conseil de surveillance et d’un directoire : au moins tous les membres du directoire et le président du conseil de surveillance.
Le ministère de l’Intérieur précise que d’autres bénéficiaires effectifs peuvent être à déclarer en fonction de l’organisation de chaque structure, « et notamment de l’ampleur des délégations de compétence ou de signature accordées ».
Pour ce qui concerne les fondations, cette déclaration s’effectue via les téléprocédures suivantes :
- lorsque l’organisme se crée, par le biais du formulaire numérique de demande de création de la structure,
- lorsque l’organisme existe déjà, par le biais du formulaire numérique de demande d’attribution d’un numéro d’identifiant
- pour tous les changements ultérieurs concernant les bénéficiaires effectifs de la structure, par le biais du formulaire numérique de déclaration de changement dans l’administration de la structure.
A noter : le ministère de l’Intérieur rappelle que lorsque l’organisme est immatriculé au registre national des entreprises dit RNE (car il emploie des salariés, demande des subventions publiques ou est soumis aux impôts commerciaux), c’est bien dans les registres dédiés audit organisme (répertoire national des associations pour les associations – RNA – ou registre national des fondations pour les fondations et fonds de dotation – RNF) et non au RNE que cette déclaration doit être effectuée.
Le chantier n’est pas terminé mais le SIAF devrait permettre de fluidifier les échanges avec les administrations concernées. En outre, cela permettra de collecter des données statistiques fiables utiles à la réalisation d’études.
Documentation (source : Ministère de l’Intérieur – DLPAJ)
[2] En vertu de l’article 222 bis du Code général des impôts.
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